Pour changer les choses, il faut d’abord les comprendre, les regarder avec un œil neuf, qui n’a pas peur de fouiller jusqu’aux tréfonds de nos biais et de nos paradoxes. C’est ce que font ces 15 films qui parlent d’écologie, de féminisme, de racisme, d’injustice sociale, de recul des libertés ou d’abus de droit ; 15 films qui nous permettent de regarder le monde en face, dans toute sa noirceur et sa complexité, mais aussi dans toute sa beauté et son inventivité.

Certains de ces documentaires dressent un portrait sombre du monde actuel, mettant parfois en exergue le pire de la nature humaine et des systèmes qui régissent nos sociétés. D’autres se penchent sur ce que l’être humain a de meilleure à offrir et à partager. Car s’il nous semble parfois que l’ombre est en train de gagner, il est essentiel de continuer à regarder la lumière. S’inspirer de ceux qui ne baissent pas les bras, inventent d’autres modèles et d’autres possibles tournés vers  l’ouverture, la solidarité, l’altruisme et l’avenir.

RBG, de Betsie West & Julie Cohen

« Je ne réclame aucune faveur pour les femmes, tout ce que je demande à nos frères, c’est qu’ils ôtent leur pied de notre nuque », déclarait Ruth Bader Ginsburg.

Juge à la cour suprême des Etats-Unis, véritable héroïne de la cause féministe et icône progressiste, Ruth Bader Ginsburg vient de nous quitter à l’âge de 87 ans. Elle se sera battue toute sa vie pour l’égalité hommes/femmes et contre toutes les formes de discrimination. Nul doute qu’elle contribua à changer la vie des femmes américaines.

En 2018, Betsy West et Julie Cohen lui rendaient hommage grâce à ce film dans lequel on découvre la  vie de « Notorious RBG ». Une vie de passion et de combat qui prouve que oui, sans aucun doute, on peut changer le monde.

Propaganda, de Jimmy Leipold et Anne Génevaux

La fabrique du consentement, ou comment les états ou des grandes entreprises manipulent l’opinion publique en utilisant la propagande pour faire adhérer les masses à leur vision du monde. Le film Propaganda revient sur la naissance et l’évolution de ces méthodes de propagande, avec des intervenants comme Stuart Ewen, Chris Hedges, Noam Chomsky, Anne Bernays ou Shelley Spector.

Il nous amène à réaliser que ces méthodes sont encore à l’œuvre aujourd’hui, la concentration de la presse entre les mains de quelques milliardaires rendant encore plus simple leur mise en place. Résultat, les informations qui nous parviennent sont au mieux partielles, au pire biaisées ou mensongères afin de nous faire adhérer à un projet de société de plus en plus déconnecté des intérêts du peuple. Un film passionnant. Pour le voir, c’est ici.

Ouvrir la voix, d’Amandine Gay

« Un film avec que des noirs, c’est du communautarisme alors qu’un film avec que des blancs, c’est juste un film. »

Ouvrir La Voix est un documentaire écrit et réalisée par Amandine Gay, autrice, réalisatrice et militante afro-féministe et LGBT. On y rencontre des femmes noires issues de l’histoire coloniale européenne en Afrique et aux Antilles qui racontent leur histoire et leur expérience de la différence en tant que femme noire. Elles décrivent notamment les discriminations spécifiques qu’elles subissent en raison de ces 2 dimensions indissociables de leur identité : « femme » et « noire ».

Un film essentiel pour prendre conscience des discriminations omniprésentes dans notre société et du privilège blanc, exercé le plus souvent de manière totalement inconsciente et sans malveillance, sans même réaliser tout ce que cela enlève aux autres.

Vous pouvez voir le film ici.

Miss Representation, de Jennifer Siebel Newsom

Miss Representation, sélectionné au Festival Sundance en 2011, explore la sous-représentation des femmes aux postes de pouvoir et d’influence et remet en question les représentations souvent désobligeantes dont elles font l’objet dans les médias.

Les médias jouent un rôle important dans l’éducation des enfants et dans l’image qu’ils se font du monde. Or la façon dont ces médias représentent la femme entretient l’idée que la valeur première d’une femme réside dans sa jeunesse, sa beauté et sa sexualité – pas en sa qualité de leader.

Pour le démontrer, Jennifer Siebel Newsom a recueilli les propos de femmes parmi les plus influentes des États-Unis, dans les domaines de la politique, de l’information, du divertissement et du milieu universitaire, notamment Condoleezza Rice, Geena Davis, Lisa Ling, Marissa Mayer, Cory Booker, etc. Elles expliquent aussi comment, selon elles, les médias peuvent être utilisées à d’autres fins, pour permettre aux nouvelles générations de se penser en femmes libres. Parce que, comme le dit Marian Wright Edelman, vous ne pouvez pas être ce que vous ne pouvez pas voir.

Vous pouvez voir ce film sur Netflix.

Numéro 387 : disparu en Méditerranée, de Madeleine Leroyer

Le 18 avril 2015, un bateau sans nom convoyant entre 800 et 1100 migrants coule au large des côtes libyennes. Très peu survivent. C’est la tragédie la plus meurtrière survenue en Méditerranée depuis la seconde guerre mondiale. Qui étaient les disparus, d’où venaient-ils ? C’est à cette question que tente de répondre ce documentaire poignant de Madeleine Leroyer.

Quelques mois après le naufrage, le gouvernement italien de Matteo Renzi décide de renflouer l’épave pour identifier les victimes. L’anthropologue légiste Cristina Cattaneo travaille sur les 528 corps retrouvés, la plus vaste opération d’identification jamais entreprise en Méditerranée. José Pablo Baraybar rencontre les familles des disparus pour recueillir le plus d’informations possibles ainsi que leur ADN, pour permettre à Cristina Cattaneo de croiser les résultats. La chercheuse Georgia Mirto arpente les cimetières de Sicile à la recherche des tombes des disparus.

Ils redonnent un nom et une histoire à ces personnes disparues en mer, qu’on nomme souvent migrants, les privant ainsi d’une véritable identité et de leur humanité. Grâce à leur enquête, on comprend l’espoir qui habitait toutes ces personnes en entamant leur traversée.

Un film essentiel pour poser un autre regard sur l’immigration, sur ce qui l’engendre et ce qu’elle engendre. Une prise de conscience nécessaire à l’aube de changements climatiques sans précédent qui multiplieront les mouvements de population. Gardons toujours à l’esprit que demain, nous serons peut-être les migrants.

Nulle part en France, de Yolande Moreau

Yolande Moreau a passé une dizaine de jours dans les jungles de Calais et de Grande-Synthe en janvier 2016, où elle a suivi la trajectoire d’un jeune Kurde de 28 ans, qui aspire à rejoindre l’Angleterre. Elle en revient avec un film témoignage dans lequel alternent des interviews et des poèmes de Laurent Gaudé lus par la réalisatrice. Elle nous emmène pendant trente minutes « Nulle part, en France ».

Un film qui met des visages et une réalité sur les mots « migrants », « sans papiers » ou « camp de réfugiés », si impersonnels qu’ils nous permettent d’occulter que derrière, il y a des êtres humains exactement comme nous. Le film est disponible sur le site d’Arte jusqu’en 2026.

Une contre-histoire de l’internet, de Sylvain Bergère

Un film documentaire sorti en 2013, qui retrace l’histoire d’Internet du point de vue des personnes ayant participé à sa conception et des activistes politiques qui en font usage.

Internet a été créé par des hippies sous LSD financés par des militaires, un paradoxe qui a donné naissance à un espace de liberté impossible à contrôler, au grand dam de ceux-là mêmes qui fabriquent depuisun siècle le consentement des peuples. Car avec internet, cela devient plus difficile. C’est pourquoi de nombreux responsables politiques cherchent à le réguler. Face à eux, de nombreux hacktivistes se battent pour préserver cet espace de liberté. Ce film leur donne la parole.

Derrière nos écrans de fumée ou The Social Dilemma, de Jeff Orlows et Larissa Rhodes

Ce documentaire révèle l’impact disproportionné que quelques ingénieurs de la Silicon Valley ont eu sur la façon dont nous pensons, agissons et vivons nos vies. C’est un fait, vous n’avez plus aucun secret pour Google, Facebook, Twitter ou Instagram. Tout ce que vous faites sur internet est observé, enregistré, analysé et utilisé pour affiner des algorithmes qui vous fourniront des contenus toujours plus addictifs.

Ces outils sont créés pour engendrer une dépendance et vous influencer. Ainsi, ce que vous pensez, ce que vous désirez, ce que vous achetez, ce que vous votez ne dépend plus de vous mais de ces algorithmes qui entrainent désinformation, radicalisation, dépression et polarisation de la société. Pour les réalisateurs, tout ceci n’est pas le fruit de dysfonctionnements mais d’une volonté assumée de manipuler les utilisateurs.

On ressort de son visionnage avec une furieuse envie de supprimer son compte Facebook et Instagram, d’utiliser Lilo, Ecosia ou encore ProtonMail…

Dans la même thématique, le film The Great Hack, décryptant l’affaire Cambridge Analytica, également disponible sur Netflix, est une très belle preuve par l’exemple de ce que ce film avance.

Citizen Four, de Laura Poitras

Janvier 2013, Edward Snowden contacte la journaliste anglaise Laura Poitras sous le nom de code CitizenFour, s’apprêtant à déclencher l’un des plus grands séismes politiques aux États-Unis en révélant des documents secret-défense de la NSA. Elle le rejoint à Hong Kong et réalise en temps réel CitizenFour, un film historique et un portrait intime d’Edward Snowden.

Un film à voir absolument et à compléter par le film Snowden, terrifiant mais tout aussi nécessaire, réalisé par Oliver Stone et retraçant l’histoire d’Edward Snowden de ses débuts à la CIA à sa décision de révéler les graves manquements éthiques de son employeur.

Pour voir CitizenFour, c’est ici.

Pour voir Snowden, c’est là ou sur Netflix.

Vers un monde altruiste, de Sylvie Gilman & Thierry de Lestrade

Ce documentaire, dans lequel intervient notamment le moine bouddhiste Matthieu Ricard, pose un postulat ô combien réconfortant : l’altruisme et la coopération sont des composants essentiels de la nature humaine. On peut les cultiver et, quand on le fait, des choses extraordinaires surviennent.

« Dans notre société matérialiste où paraissent régner sans partage le profit, le cynisme et l’égoïsme, l’hypothèse bouscule les idées reçues : l’altruisme existe depuis la nuit des temps, c’est un facteur essentiel de la vie sociale… et on peut le prouver scientifiquement. Mieux : puisque l’altruisme existe, nous avons la possibilité de le cultiver. Et de promouvoir une société davantage basée sur la coopération afin de répondre aux défis de notre monde en crise. C’est le pari de chercheurs venus d’horizons divers : primatologues, économistes, neuro-scientifiques, psychologues, médecins et… un généticien devenu moine bouddhiste. »

Un film plein d’espoir, qui change notre manière de percevoir l’humanité.

Pour le regarder en intégralité, c’est ici.

J’veux du soleil, de Gilles Perret et François Ruffin

Loin des clichés véhiculés dans les médias sur le mouvement des gilets jaunes, ce film dresse un portrait honnête et respectueux de cette France d’en bas, oubliée de la start-up nation et qui se révolte depuis novembre 2018.

François Ruffin et Gilles Perret se sont lancés dans un road-trip à leur rencontre pour rappeler à tous ceux qui les méprisent ou ne comprennent pas leur colère, que ces gens sont simplement des êtres humains lassés d’être dédaignés.

« Avec leur humour et leur caméra, Gilles Perret et François Ruffin traversent le pays : à chaque rond-point en jaune, c’est comme un paquet-surprise qu’on ouvrirait. Qu’est-ce qui va en sortir ? Des rires ou des larmes ? De la tendresse ou de la colère ? De l’art ou du désespoir ? Les deux compères nous offrent des tranches d’humanité, saisissent cet instant magique où des femmes et des hommes, d’habitude résignés, se dressent et se redressent, avec fierté, avec beauté, pour réclamer leur part de bonheur. »

Pour voir ce film, c’est ici.

Qu’est-ce qu’on attend ? de Marie-Monique Robin

Ce film raconte l’histoire d’un petite ville alsacienne de 2200 habitants, championne des villes en transition d’après Rob Hopkins, fondateur du mouvement des villes en transition.

A Ungersheim, on invente une nouvelle manière de vivre, tournée vers l’après-pétrole et la réduction de son empreinte écologique. Pour y parvenir, toutes les générations s’y sont mis avec un triple objectif : l’autonomie intellectuelle, l’autonomie énergétique et la souveraineté alimentaire. Là-bas, le ramassage scolaire se fait en calèche, les légumes de la cantine sont cultivés sur un terrain communal, la piscine municipale fonctionne au bois et à l’énergie solaire et les habitants paient leurs commerçants  dans une monnaie locale créée à l’initiative du maire, les radis, qui favorise les achats de proximité.

Cette idée de transition énergétique initiée par le maire de la ville, au début, personne n’y a cru. Pourtant, quelques années plus tard, tout le monde est enchanté d’avoir emprunté ce chemin. Et s’ils sont encore loin d’avoir atteint l’autonomie, les habitants sont persuadés d’être sur la bonne voie et se considèrent même comme un laboratoire.

Un film qui ouvre le champ des possibles et donne envie d’inventer d’autres façons de vivre.

Vous pouvez en acheter le DVD ici.

Food Coop, de Tom Boothe

La Food Coop, à Park Slope, Brooklyn, c’est un supermarché pas comme les autres. Ouvert en 1973, c’est la plus ancienne coopérative alimentaire des États-Unis. Un magasin participatif et autogéré où 16 000 membres travaillent 3 heures par mois pour avoir le droit d’y acheter des produits alimentaires pour la plupart biologiques et fabriqués à moins de 800 kms.

Cette Food Coop, c’est un havre de solidarité, de localité, de nourriture de saine et de partage en plein coeur de New York. Là-bas, on fabrique du sens et du lien. Entre producteurs et consommateurs, mais aussi entre les habitants du quartier qui y travaillent. Ils sont 500 bénévoles, âgés de 21 à 77 ans, chômeurs, banquiers ou directeur marketing. Ensemble, ils réceptionnent, mettent en rayon, tiennent la caisse, nettoient, conseillent, etc. En échange de leur temps, ils ont la possibilité de se nourrir sainement à moindre frais.

Un concept en pleine essor aux États-Unis et qu’il faut absolument développer partout ailleurs pour lutter contre les ravages de la grande distribution. En France, des initiatives similaires ont déja vu le jour, comme La Louve, food coop parisienne créée par Tom Boothe, le réalisateur de ce film, ou encore l’Elefan, à Grenoble.

Vous pouvez visionner le film ici

En quête de sens, de Nathanaël Coste et Marc de la Ménardière

Un film primé au Sundance Festival, à mi-chemin entre le documentaire et la fiction, dans lequel les 2 réalisateurs nous embarquent dans leur voyage initiatique. Ils partagent leurs doutes et leurs questionnements concernant le monde d’aujourd’hui. Pour cela, ils ont voyagé de l’Inde au Guatemala en passant par San Francisco pour recueillir les témoignages de Vandana Shiva, Bruce Lipton, Satish Kumar, Pierre Rabhi ou encore Frédéric Lenoir, mais aussi d’un biologiste cellulaire, d’un jardinier urbain, d’un chamane itinérant, d’une cantatrice présidente d’ONG, d’activistes, de biologistes, de philosophes ou de gardiens des traditions anciennes….

Vous ne trouverez pas dans ce film de solutions toutes faites pour fabriquer un monde meilleur mais toute la matière nécessaire à une véritable prise de conscience et une remise en question profonde de nos modes de vie.

Le film a été coproduit par une campagne de financement participatif et est distribué de manière indépendante par l’association Kamea Meah. Le DVD du film est disponible ici.

Terres de femmes, le souci de la terre, de Marie-Ange Poyet

Terres de femmes, c’est une série de portraits qui nous emmène à la rencontre de 12 femmes agricultrices biologiques vivant de la terre en région Auvergne Rhone-Alpes. Elles sont maraîchères, viticultrices, éleveuses, apicultrices ou paysannes boulangères, elles sont passionnées par leur métier et amoureuses de leur terre.

« Elles travaillent pour nous, à côté de nous mais qui les voit et les entend vraiment ? Cette invisibilité des femmes dans la paysannerie n’est sans doute pas différente de celle des femmes scientifiques ou ouvrières dans une histoire du monde qui s’est écrite au masculin. La seule différence pour moi est que je suis issue de cette paysannerie et d’une longue lignée de femmes qui se sont échinées sur les Hautes-Chaumes des Monts du Forez, travaillant comme de véritables bêtes de somme et élevant des flopées d’enfants tout en restant derrière leurs hommes, dans l’ombre et sans élever la voix », dit Marie-Ange Poyet.

Une plongée dans le quotidien de celles qui, dans l’ombre, cultivent, élèvent et nourrissent, en travaillant avec la nature et non contre elle. Pour comprendre qu’une autre manière de produire et de consommer est possible.