Artiste, créatrice et artisane, Marie a créé Le Bestiaire en 2011. Une marque de prêt-à-porter entièrement fabriquée en France, dans laquelle on retrouve ses obsessions, ses motifs fétiches, des matériaux nobles et une approche toute personnelle du végétal et de l’animal, omniprésents dans ses créations.
Formée comme styliste aux Arts Appliqués Duperré, elle a débuté sa carrière en travaillant avec le créateur José Lévy qui lui communiquera son goût immodéré pour la liberté. Grâce à lui, elle réalise comme il est précieux de suivre son instinct sans se préoccuper des tendances.
En 2011, après 10 ans passés à designer les collections d’une boutique de décoration parisienne, elle se retrouve sans emploi. Or, ne rien faire, c’est quelque chose qu’elle ne sait pas faire, Marie. Il lui faut une idée. Elle tâtonne, cherche, expérimente, fouillant dans ses sources d’inspiration, ses savoir-faire, ses expériences, l’idée qu’elle pourra creuser, qui la fera suffisamment vibrer pour l’emmener dans une nouvelle aventure, si possible au long cours. De ces tergiversations solitaires naîtra Le Bestiaire.
Genèse d’un bestiaire
Une idée tombée là par hasard, comme une évidence. C’est ainsi qu’on pourrait décrire la genèse du Bestiaire.
D’un côté, il y avait la fascination de Marie pour les cabinets de curiosité. Sa passion pour les oiseaux, la nature et les planches botaniques. De l’autre, son besoin de créer et de fabriquer sans savoir encore quoi. Arrivent alors, comme tombées du ciel, des chutes de cuir de toutes les couleurs, cadeau d’une amie maroquinière. Et puis le regard de Marie croise une image de plumage et le déclic se produit.
En quelques heures, elle donne naissance au premier Volatile, un sweat sur lequel elle applique des pétales de cuir qui forment une aile d’oiseau et qui deviendra le symbole de sa marque. Une pièce douce, confortable et ô combien audacieuse. De ces pièces qui happent le regard et font se dire « mon dieu mais c’est évident, pourquoi personne n’a pensé à faire ça avant ? ».
Le nom de sa marque arrivera lui aussi par hasard, comme une évidence, au cours d’une promenade dans Paris, d’une rencontre avec une vitrine qui fait apparaître un mot dans la tête. Le Bestiaire.
L’envol du Bestiaire
Aussitôt, la magie opère. Autour d’elle, l’engouement est total, les demandes se multiplient, on lui conseille de créer une page Facebook où présenter ses créations pour les proposer à la vente. Le nombre d’abonnés augmente, le volume de commandes aussi.
Alors qu’elle organise une vente privée dans son appartement, elle reçoit la visite des 2 fondateurs d’une boutique de créateurs parisiens. Ils lui commandent sa toute première collection. Leur thème : Paris. Marie imagine alors une collection de sweats s’inspirant des pigeons. Parce que le roi des oiseaux parisiens, c’est le pigeon. « C’est magnifique, un pigeon. Il y a des couleurs incroyables sur leur plumage. C’est nacré, moiré, à la fois vert, rose, bleu, violet… Tout le monde les déteste, moi je les adore ».
C’est un succès et d’autres commandes suivent. Le Bestiaire est référencé dans de plus en plus de boutiques. Marie s’étonne, LeBestiaire se déploie.
Durant 7 ans, elle va créer à la demande les pièces de sa collection, chez elle, dans son petit appartement du 18e arrondissement parisien. Elle multiplie les créations, explore les plumages des oiseaux du monde entier, s’essaie à de nouvelles techniques en restant fidèle à ses thèmes de prédilection.
Le Bestiaire est une belle réussite mais Marie finit par s’essouffler. « Je travaillais énormément, je fonctionnais à la commande et donc en flux tendu. J’arrivais à en vivre mais j’avais du mal à me constituer une trésorerie, ce qui laissait peu de perspectives d’évolution. Et puis la confection me prenait tellement de temps que ça m’empêchait de travailler sur d’autres choses, de développer d’autres idées. »
Ainsi, ironie du sort, ces Volatiles qui l’ont révélée commencent à lui briser les ailes, l’empêchant d’assouvir de nouvelles envies et de réaliser toutes ses ambitions.
En 2016, alors qu’elle songe sérieusement à laisser s’endormir Le Bestiaire, elle retrouve un ami d’enfance, Alexis Cabanne, propriétaire, entre autre, de la maison familiale Féret Parfumeur. Il lui propose de donner un nouveau souffle à sa marque en devenant son partenaire. Ensemble, ils imaginent une nouvelle collection, fidèle à l’histoire du Bestiaire mais résolument tourné vers l’avenir. Une collection imaginée et dessinée par Marie et fabriquée en France, dans de petits ateliers et manufactures aux savoir-faire ancestraux.
Les sources d’inspiration de Marie
Souvent, les idées tombées de nulle part viennent en fait de très loin. Et il faut remonter jusqu’au tout début de l’histoire pour réaliser qu’on ne devient que ce que l’on est. Ainsi, Le Bestiaire est né bien avant 2011, dans chacun des éléments d’inspiration qui ont façonné l’univers de sa créatrice.
Rose, sa grand-mère
Un être à qui elle voue un amour fou et qui lui apprend, petite, lors de vacances dans le bungalow familial de la côte Atlantique, le nom des fleurs et des oiseaux. C’est avec elle que Marie développera sa passion pour la faune et la flore. « Elle ramassait des fleurs dans toutes les villes où elle allait, tous les jardins où elle passait pour les faire sécher dans du papier de soie. Elle m’a appris à faire des herbiers. Dès qu’on voyait un oiseau, elle sortait son encyclopédie pour regarder ce que c’était. »
Les cabinets de curiosité
Très tôt dans sa vie, l’univers des cabinets de curiosité la fascine, notamment Le Cabinet des curiosités naturelles d’Albertus Seba ou encore les planches botaniques de Pierre-Joseph Redouté. « J’ai toujours aimé ça. Chez moi, j’ai plein d’animaux empaillés, de planches botaniques. Tu me mets dans un jardin, je peux y passer des heures à observer les fleurs, les insectes. Et bien sûr, j’adore les oiseaux. J’ai fait beaucoup de recherches pour les palettes des sweats volatiles et je suis toujours fascinée par la beauté des plumages, leur diversité, leurs couleurs qui donnent l’impression d’avoir été peintes au spray. Et puis la plume en elle-même, c’est quelque chose de magnifique, le mélange de matières, l’infinité de formes possibles… »
La matière et le tissu
Marie habite à côté des magasins de tissu du 18e arrondissement parisien dans lesquels elle peut passer des heures, à toucher la matière, fouiller les coupons et finir par acheter des tissus sans savoir ce qu’elle en fera, juste parce que c’est beau. Au départ, c’est la matière qu’elle aime, plus que le design. « J’ai besoin de toucher, de créer à partir d’une matière qui m’inspire. »
Tout, à partir du moment où on sait regarder
« Mais en fait tout est inspirant : une fissure dans un mur, un trou, les nervures d’une feuille, un objet oublié dans la rue… J’aime ce qui est graphique. De la moisissure en gros plan, par exemple, c’est magnifique, c’est un mélange de matières incroyables avec des palettes de couleurs super intéressantes. »
Des valeurs humaines essentielles
Une fabrication éthique et durable
Dès le départ de cette collection, il y avait la volonté de localiser la fabrication en France. D’une part pour valoriser et préserver des savoir-faire ancestraux, d’autre part pour agir de manière éthique. « À Roanne, sur les 15 filatures historiques, la moitié ont fermé. C’est triste de voir ces savoir-faire disparaître. Et puis pour moi, c’est important d’agir avec conscience, de préserver la planète en ne faisant pas prendre l’avion ou le bateau à des produits fabriqués à l’autre bout du monde. Bien sûr ça a un impact sur le coût de nos pièces, mais il faut savoir ce qu’on veut. »
Une entreprise comme un cocon
Son investisseur, elle le connaît depuis l’enfance. Son bras droit, c’est sa meilleure amie. Ses modèles sont elles aussi des amies qu’elle admire, comme Ornette, artiste et musicienne. Dès qu’elle le peut, elle travaille avec des gens qu’elle aime. « J’ai besoin de liens, de connaître les gens avec qui je travaille, de me sentir en confiance. En fait, j’ai voulu créer une entreprise familiale. »
Le choix des matières
Le choix des tissus est essentiel pour Marie car c’est sur ces matières que reposent la qualité, le style et le volume de ses créations. Ainsi, les créations Le Bestiaire sont fabriquées avec des matières naturelles, végétales, minérales ou organiques. Les tissus sont désignés et fabriqués en France par des artisans français. « Je refuse autant que possible le polyester et toutes les matières synthétiques dérivées du pétrole, j’ai un vrai problème avec le plastique. Je préfère de loin des matières raffinées, nobles et naturelles. »
L’abeille, tout un symbole
Réalisée en laiton par une fonderie du sud de la France, l’abeille du Bestiaire est tout un symbole. Celui d’un savoir-faire français à préserver, tout d’abord. Et puis l’abeille est un élément fondateur des cabinets de curiosité ancestraux. Sa couleur or rappelle Louis XIV qui avait lui-même sa propre ménagerie à Versailles. « Mais par sa fragilité, l’abeille est également le symbole de la dérive actuelle du monde, de notre rapport malade à l’environnement qui nous pousse à l’exploiter toujours plus, quitte à s’auto-détruire. »
Laisser venir l’inspiration
Le Bestiaire ne fonctionne pas sur un principe de collection. De nouvelles pièces sont ajoutées tout au long de l’année quand d’autres disparaissent de façon naturelle. « Le concept de collection implique que l’inspiration vienne sur commande, 2 fois par an, or ça ne marche pas toujours comme ça. Je préfère fonctionner au feeling. Quand je trouve qu’il manque quelque chose, un chemisier, un pantalon, je le crée. Les nouvelles pièces arrivent selon l’inspiration et sont fabriquées en un nombre d’exemplaires limités. Quand il n’y en a plus, on passe à autre chose. »
Plus qu’une marque de mode, Le Bestiaire est une plongée dans l’univers imaginaire, poétique et curieux de sa créatrice. Un voyage inspirant dans un monde peuplé d’oiseaux rares, de plantes grandioses et de textures précieuses.
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